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Québec

1.- Les précédents

Les précédents, qui composent la jurisprudence parlementaire, constituent une autre source importante de la procédure. En effet, dans l’exercice de leurs fonctions, les présidents de l’Assemblée et les présidents de commission doivent interpréter le règlement. D’abord, au moment de l’application du règlement à une diversité de situations, des ambiguïtés ou des difficultés d’interprétation peuvent apparaître. Ensuite, les rappels au règlement soulevés par les députés obligent la présidence à préciser la procédure. Par ailleurs, le règlement lui-même invite le président à signaler immédiatement toute violation du règlement dont il a connaissance. Enfin, il est également investi d’un pouvoir décisionnel pour certains actes de procédure, notamment en ce qui a trait à la recevabilité d’une motion ou d’un amendement.

L’article 41 du Règlement prévoit que le président se prononce sur les rappels au règlement au moment où il le juge opportun, en indiquant le motif de sa décision. Il peut faire connaître sa décision sur-le-champ ou prendre la question en délibéré. Il rend ses décisions publiquement durant une séance, ou, parfois, en privé (private ruling).

Les décisions du président constituent des précédents pour ses successeurs, les députés et les fonctionnaires. Toutefois, la présidence conserve un pouvoir d’appréciation pour adapter la jurisprudence aux circonstances. De plus, les rappels au règlement sur un même sujet n’étant jamais exactement similaires, les décisions précédentes ne peuvent pas, le plus souvent, être transposées telles quelles.

L’autorité des décisions résulte du fait que le président a le pouvoir exclusif d’interpréter les règles de droit parlementaire et qu’il n’y a pas d’appel des décisions de la présidence [1].

2.- Le consentement unanime

Le règlement et les règles de fonctionnement s’appliquent d’office et la présidence est tenue de les faire observer. Toutefois, l’Assemblée ayant le pouvoir exclusif de fixer ses propres règles, elle peut logiquement y déroger, par exemple pour régir une situation dans laquelle les règles permanentes ne semblent pas pertinentes, ou pour accélérer l’étude d’une affaire.

Le « consentement unanime » fait partie intégrante des usages parlementaires. C’est un moyen commode et efficace pour modifier un ordre existant lorsque l’Assemblée siège, qui permet de faire l’économie d’un préavis de motion, d’un débat et d’un vote. La seule exigence est que la présidence s’assure de l’accord de tous les membres présents. De fait, le consentement unanime donne souvent lieu à des négociations entre les groupes parlementaires, auxquelles sont associés les députés indépendants.
L’Assemblée peut, par consentement unanime, déroger à n’importe quelle disposition de son règlement.

3.- L’ordre spécial de l’Assemblée

Dans certains cas, les parlementaires veulent aller encore plus loin que la simple dérogation au règlement et établir une nouvelle procédure temporaire.
L’Assemblée adopte alors une motion établissant une procédure différente de celle qui est prévue dans le règlement pour régir provisoirement une situation particulière. La motion, une fois adoptée, devient un ordre de l’Assemblée.
Cet ordre spécial a priorité sur toute disposition du règlement auquel il déroge implicitement.

4.- La motion de procédure d’exception

Lorsqu’un projet est contesté par l’opposition et que cette dernière utilise tous les moyens mis à sa disposition par le règlement pour en retarder l’adoption, les règles permanentes peuvent représenter, du point de vue du gouvernement, un obstacle. Pour répondre à cette situation, le règlement prévoit une procédure exceptionnelle à l’initiative du gouvernement, par laquelle ce dernier peut passer outre à certaines règles permanentes de procédure en introduisant de nouvelles règles pour l’étude d’une affaire [RAN, art. 182]. Le gouvernement a parfois recours à la motion de procédure d’exception pour faire adopter un projet de loi ou, moins souvent, une motion [2] .

5.- L’usage, la tradition et la pratique

Lorsque le règlement est silencieux, il peut parfois être utile de se référer aux usages, aux traditions et à la pratique.
De même, lorsque le règlement est muet ou manque de précision sur un point donné, les présidents ont permis de recourir aux dispositions des anciens règlements de l’Assemblée. Toutefois, cela ne se justifie que dans les circonstances où le règlement en vigueur ne répond pas à la question soulevée, et à l’issue d’une analyse préalable minutieuse. En fait, l’Assemblée nationale n’ayant pas abrogé les règlements antérieurs, ceux-ci font partie de l’évolution de ses règles de procédure ; à ce titre, celui qui est chargé de les interpréter peut – et doit – les consulter pour éclairer le règlement actuel.

Le recours aux usages, aux traditions et à la pratique d’autres assemblées législatives qui ont le même mode de fonctionnement est aussi possible, moyennant les mêmes précautions que pour le recours aux anciens règlements.

6.- Les auteurs

Quelques auteurs font désormais autorité dans le domaine de la procédure parlementaire de type britannique.
Dans la mesure où l’Assemblée nationale du Québec partage avec les autres assemblées de type britannique le même système parlementaire, il n’est pas illégitime de recourir, si besoin est, à la doctrine. Ici encore, il convient de bien évaluer la pertinence d’une source doctrinale externe quand il s’agit d’interpréter une règle applicable à l’Assemblée nationale du Québec.

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