Instances

Intervention de M. Rajkeswur Purryag, Président de l'Assemblée nationale de l'île Maurice

Monsieur le Président
Honorable Délégués de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie

Mesdames et Messieurs

Au nom de la délégation Mauricienne, permettez moi
de partager avec vous notre inquiétude sur les
consequences de la crise économique qui est en train
de secouer le monde dans son ensemble, plus
particulièrement les Etats Africains et sur les énormes
défis que doit relever le continent Africain par rapport
à l’effondrement économique mondial ; un phénomène
sans précédent depuis la grande récession des
années 30.

Monsieur le Président

Selon les analystes avisés, nous vivons la pire des
récessions depuis la deuxième guerre mondiale.

Et nous connaissons tous les raisons qui ont
provoqué cette présente crise, (des prêts
hypothécaires en Amérique), et qui s’est parla suite
propagée aux marchés financiers, eux·mêmes basés
sur une réglementation peu solide, et non-fiable,
sinon insuffisante.

Les conséquences de cette crise sont telles que le
volume des échanges commerciaux a reculé
globalement, couplé d’une baisse dramatique des
mouvements internationaux de capitaux privés,
baisses des investissements dans les secteurs clés,
aggravation de la crise alimentaire et énergétique,
une inflation galopante, pour ne citer que quelques
exemples.

Autant de problèmes dont les répercussions sont en
premier lieu plus frappantes pour les pays en
développement en situation d’extrême pauvreté.

On estime a plus de 100 millions de personnes qui
pourraient souffrir de la faim et de la misère de par
cette situation. Les événements auxquels nous
assistons ont aussi de profondes implications pour la
paix et la stabilité mondiale.

Monsieur le Président

Comme l’a fait ressortir le Président Sarkozy tout
récemment, il nous faut tirer les leçons de |’Histoire et
ne pas répéter les erreurs du passé dont les
conséquences pourraient se révéler désastreuses. Il
est impératif de s’attaquer,( car ils nous interpellent
tous) aux problèmes économiques, financiers mais
également humains. Nous nous devons d’agir de
manière cohérente et coordonnée afin de nous
assurer que cette crise ne devienne un drame qui
pourrait ravager l’ensemble de la planète.

Et là, à maints égards, l’Afrique qui comprend le plus
grand nombre de pays les mois avancés du globe,
sinon les plus pauvres est le plus exposé et en plus
grand danger.

Comme certains l’ont rappelé, "l’Afrique est une
victime innocente du tsunami économique. D’où
la nécessité à mon sens pour la communauté
internationale d’apporter toute sa contribution, voire
toute son aide en vue de permettre aux pays
Africains, surtout les importateurs nets d’aliments
d’émerger de cette crise.

L’économie africaine a été mise à rude épreuve.
Selon Dominique Strauss·Kahn, Directeur·Général du
Fonds Monétaire International, " la mauvaise fortune
s’est acharnée sur |’Afrique".

La question qui est posée est de savoir pourquoi
l’Afrique est-elle frappée de plein fouet par cette crise
économique internationale, alors qu’elle n‘en est
nullement responsable. La raison est simple- ce sont
l’intensité et l’ampleur de la crise.
Contrairement aux pays riches de la planète,
notamment, les pays producteurs de pétrole, qui ont
accumulé suffisamment de réserves qui leur
permettent de sortir ou de minimiser l’impact du choc
économique, l’Afrique, elle, dispose des moyens très
limités pour financer des mesures capables de
réduire les effets de la crise et d’entreprendre les
investissements sur des projets d’infrastructures ou
des programmes sociaux qui pourraient faciliter la
création d’emplois, et ainsi aider a combattre la
pauvreté.

Nous constatons avec tristesse que pour beaucoup
de pays Africains, la marge de manœuvre de réussite
est réduite sinon quasi-inexistante, faute de moyens
financiers, alors que le choc financier touche
pratiquement tous les secteurs économiques, avec
des conséquences sociales énormes telles que les
pertes d’emplois, la dépréciation du taux de change,
une croissance constamment en baisse, la montée en
flèche de l’inflation, baisse de capitaux privés
étrangers, l’augmentation du nombre de personnes
séropositives et atteintes du sida.

D’autre part les hausses récentes et rapides des prix
d’alimentaires et produits énergétiques ont plongé
dans une misère indicible des millions de personnes
et se traduisent par le désespoir et la colère
provoquant très souvent des émeutes.

Monsieur le Président

Dans cette perspective, la lutte contre la pauvreté est
devenue plus difficile étant donné que les ressources
déjà limitées connaitront une réduction drastique.
Le changement climatique a touché d’abord les
populations pauvres et ce, de manière plus sévère,
en provoquant de plus en plus de sècheresses et
inondations qui menacent leurs moyens de
subsistance. Aussi, dois-je souligner que les pays
pauvres sont victimes d’une injustice flagrante. Par
exemple, ils doivent payer le prix de la pollution des
pays riches. Le peu d’argent destiné à les aider est
détourné des promesses d’aide au développement
nécessaire et ils doivent rembourser l’argent avec
intérêts. Si la tendance était renversée, la pauvreté
pourrait disparaitre.

D’où notre appel aux pays riches qui ont le pouvoir et
les moyens financiers et économiques d’éradiquer la
pauvreté. Ils ont aussi la capacité de mettre un terme
â cette crise financière actuelle tout comme ils
peuvent aider les pays pauvres â lutter contre la crise
alimentaire, contre le changement climatique, contre
l’insecurité.

L’éradication de la pauvreté est une condition
préalable â leur développement. Cependant, elle
exigera des financements massifs dont seuls les pays
riches en ont les moyens. Il n’est pas trop tard, mais il
le sera, si les nations riches n’agissent pas vite.lIs
n’ont pas le droit d’attendre alors que les conditions
de vie de beaucoup de femmes et d’hommes en
Afrique se dégradent face à la misère, a la faim, au
travail forcé, face à l’épuisement des ressources.

Monsieur le Président, plus que jamais, l’Afrique a
besoin de l’aide de la communauté internationale.
L’aide ne devrait pas diminuer, elle devrait, au
contraire, s’accroitre. De plus, les engagements
d’aide doivent s’échelonner sur plusieurs années
plutôt que sur quelques mois. Selon l’OXFAM,
l’intervention des pays riches pour lutter contre la
pauvreté et la faim en Afrique est une obligation
morale et irréversible

Un monde en développement plus prospère, plus
égal et plus sur est dans l’intérêt de tous. Nous
reconnaissons que le défi est immense, mais il n’est
pas insurmontable. Nous devons œuvrer pour un
partenariat mondial avec une approche multilatérale
et des solutions pragmatiques pour en arriver
jusqu’au bout.

Les bailleurs de fonds devront également jouer leur
rôle. C’est vrai que l’argent à lui seul ne viendra pas à
bout de cette crise économique sans précédent mais
â n’en point douter, il fait partie de la solution.

Monsieur le Président
Medames et Messieurs
Maurice, petit état insulaire n’est pas épargné par la
crise mais elle a déjà assumé ses responsabilités en
la matière a travers des programmes d’aide au
financement (Additional Stimulus Package). Elle a
entamé des réformes économiques nécessaires tout
en redéfinissant ses priorités afin de les adapter aux
réalités socio-économiques du jour. Certes, il nous
reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Nous
restons quand même très optimistes concernant
|’avenir.

A coté des répercussions engendrées par cette crise
multidimensionnelle, il y a aussi des opportunités qu’il
faut savoir capitaliser. Il est nécessaire de tirer
ensemble les enseignements utiles pour envisager
avec sérénité la relance de nos économies. Le
continent Africain regorge d’énormes potentialités
qu’il convient de valoriser. Les difficultés
économiques ne doivent pas nous servir de prétexte.
Des progrès remarquables sont possibles et sont déjà
en cours dans beaucoup de pays africains. Grâce à
une action organisée et concertée, nous pourrons
jeter la pauvreté aux oubliettes.

Je vous remercie pour votre attention.

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