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Déclaration finale de la Conférence parlementaire francophone sur les changements climatiques

La Conférence parlementaire francophone sur les changements climatiques organisée conjointement par l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) et l’Institut de la Francophonie pour le développement durable (IFDD), s’est tenue à Brazzaville le 28 mai 2014. Les travaux ont porté sur deux thèmes, les enjeux de la Conférence de Paris Climat 2015, et l’émergence économique à l’épreuve du changement climatique.
Dix-huit parlements membres de l’APF ont participé à cette Conférence ainsi que les représentants de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), du Comité Directeur du Forum des Parlementaires de la Convention des Nations Unies sur la Lutte contre la Désertification (CNULCD), du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), de l’Union économique monétaire ouest africaine (UEMOA).

1. Les rapports du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) nous rappellent que les dérèglements climatiques sont l’un des plus grands défis de notre temps. Les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter de façon importante et les effets de ces émissions sur le climat affectent des millions de personnes dans le monde, en particulier dans les pays en développement. Les personnes les plus vulnérables et pauvres sont les premières touchées. C’est particulièrement le cas des habitants des petits Etats insulaires et des terres basses des pays côtiers, mais également des pays désertiques et semi-désertiques

2. Cette menace potentiellement irréversible pour l’humanité et la planète appelle d’urgence une réponse globale, collective et concertée. Il s’agit de garantir à long terme le développement durable, la sécurité énergétique, la sécurité alimentaire, l’approvisionnement en eau potable et la réduction des risques d’inondations, de sécheresse et autres catastrophes. Les dérèglements climatiques ne connaissent pas de frontière et affectent indifféremment toutes les populations, exacerbant les problèmes liés à la justice sociale, à l’équité et aux droits de l’Homme et compromettant la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement.

3. Nous, parlementaires francophones, rappelons combien il est vital d’agir rapidement pour lutter efficacement contre le dérèglement climatique et limiter le réchauffement en dessous de 2°C par rapport à l’ère préindustrielle. Nous avons exprimé les vives préoccupations que nous inspirent les avancées insuffisantes enregistrées dans les négociations intergouvernementales sur les changements climatiques. Le but de ces négociations reste l’élaboration, lors de la vingt et unième Conférence des parties à la Convention Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP 21) qui se tiendra à Paris en 2015, d’un nouvel accord contraignant applicable à tous, qui devra entrer en vigueur au plus tard en 2020.

4. Nous, parlementaires francophones, rappelons l’urgente nécessité pour toutes les parties de lancer ou d’intensifier leurs préparations internes concernant les contributions qu’elles envisagent de décider au niveau national, pour atteindre l’objectif de la Convention, dans le contexte de l’adoption d’un accord contraignant lors de la COP21 à Paris, et de les communiquer d’ici au premier trimestre 2015.
Nous nous engageons à aider nos gouvernements respectifs à mettre en oeuvre les accords existants et futurs sur les changements climatiques et sur la réduction des risques de catastrophe.

5. Aux côtés des gouvernements, des autorités locales, des entreprises et des acteurs de la société civile, les parlements doivent assumer leur part de responsabilité dans la définition et la mise en oeuvre d’une réponse commune au défi des changements climatiques, notamment à travers l’appui à la mise en place de mesures institutionnelles, législatives et réglementaires adaptées. Nous, parlementaires francophones, sommes résolus à assumer pleinement nos responsabilités et à donner l’impulsion requise pour rechercher des réponses durables à long terme aux menaces qui pèsent sur l’environnement. Nous appelons donc les parlements à continuer d’agir pour assurer l’adoption et la mise en oeuvre de politiques et de lois sur les changements climatiques. De plus, nous décidons d’exercer plus étroitement notre droit de regard sur l’action et les engagements des gouvernements sur ces questions.

6. Nous, parlementaires francophones, soulignons la nécessité d’un accord équilibré à Paris sur le climat en 2015, portant aussi bien sur l’atténuation que sur l’adaptation, et prévoyant les moyens de mise en oeuvre, en particulier l’intensification des transferts de technologie, des mesures de renforcement des capacités et de transfert de savoir-faire envers les pays les plus vulnérables et la fourniture de ressources financières pour l’Afrique.

7. Nous relevons l’importance du Sommet sur le climat convoqué par le Secrétaire général des Nations Unies le 23 septembre 2014 à New York, ayant pour objet de mobiliser l’action et les ambitions dans le domaine du changement climatique et nous engageons à sensibiliser et mobiliser nos chefs d’Etats et de gouvernement afin qu’ils puissent prendre part activement à cet événement et ainsi donner une impulsion politique forte lors du Sommet.

8. Nous, parlementaires francophones, insistons sur l’importance de la promotion d’un programme positif de lutte contre le dérèglement climatique, fondé sur la coopération, afin d’optimiser les opportunités offertes par la lutte contre le changement climatique en matière de diminution de la pauvreté, de développement durable, d’accès à l’énergie, de lutte contre la désertification, de déforestation et de dégradation des sols, de soutien à une agriculture résiliente au changement climatique et au développement d’une économie verte à même de promouvoir la création d’emplois verts notamment pour les jeunes et les femmes. Nous sommes conscients que l’Afrique dispose d’un immense potentiel en matière d’énergies renouvelables et demandons à travailler conjointement pour en réduire drastiquement les coûts, l’objectif étant de les diviser par deux.

Nous affirmons notre soutien à « l’Initiative Energie Durable pour Tous » (« Sustainable Energy for All (SE4All) ») du Secrétaire général des Nations Unies et saluons notamment ses objectifs d’assurer un accès universel aux services énergétiques modernes, de doubler le taux d’amélioration de l’efficacité énergétique et de doubler la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique mondial.

9. L’Afrique contribue seulement à hauteur de 4 % des rejets de gaz carbonique à effet de serre au niveau mondial. Cependant, ce continent est parmi les espaces de la planète les plus directement affectés par les dérèglements climatiques. Les conséquences humaines, écologiques, sociales et économiques sont sérieuses et deviennent particulièrement préoccupantes. Le sommet de Durban avait, dans ses conclusions, débouché sur un engagement des pays industrialisés à accompagner sur le plan technique, humain et environnemental la transition des pays les plus pauvres. Force est de constater que ces engagements sont loin d’être tenus.

Le sommet de Copenhague, attendu comme le point de conclusion de la négociation internationale, a débouché sur un document non contraignant, sans engagement précis, à des années-lumière du traité international espéré.
L’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) attend donc beaucoup du sommet sur le climat qui aura lieu à Paris fin 2015.
Nous, parlementaires francophones, insistons pour qu’au delà du constat et des diagnostics partagés, le sommet de Paris soit à la hauteur de nos attentes et que les pays industrialisés accompagnent par des actions concrètes et des engagements financiers, les efforts des pays les plus pauvres et de ceux de l’espace francophone en particulier. L’application du principe du « pollueur-payeur » doit entraîner la mise à disposition des ressources financières adéquates et des transferts de technologie en faveur des pays africains.

10. Nous, parlementaires francophones, soulignons l’importance de mettre en oeuvre immédiatement des actions d’adaptation aux effets des changement climatique sur le long terme, en tenant compte des besoins spécifiques des populations les plus vulnérables, en particulier des petits Etats insulaires en développement et des pays les moins avancés. Afin de protéger les populations et les économies des impacts néfastes des changements climatiques, nous appelons à des politiques et des mesures d’adaptation pour faire en sorte que les infrastructures critiques (hôpitaux, unités de production et transport d’énergie, écoles, routes et réseaux de transport, ponts, infrastructures de protection côtières) deviennent plus résilientes au climat, avec l’engagement de toutes les parties prenantes, y compris les banques bilatérales et multilatérales de développement et du secteur privé.

11. Nous, parlementaires francophones, rappelons l’importance d’améliorer la comptabilité des financements publics et privés de la lutte contre le changement climatique et soulignons l’urgence de bâtir une architecture financière simple, efficace et ambitieuse reposant sur le principe de son appropriation par les pays, favorisant l’accès direct aux financements en Afrique. Nous, parlementaires francophones, saluons les résultats du dernier Conseil d’administration du Fonds vert pour le Climat et appelons à une capitalisation ambitieuse et rapide de l’instrument avant la COP 20 en décembre 2014. Ce serait une contribution significative à la mobilisation du soutien en faveur de l’Afrique. Nous demandons aux banques de développement multilatérales, bilatérales et nationales de pleinement intégrer les enjeux climatiques, tant d’atténuation que d’adaptation, et appelons ces acteurs à concourir à une meilleure efficacité des financements climat. Nous reconnaissons que la réorientation des subventions aux énergies fossiles devrait se faire au profit de la lutte contre le changement climatique et du développement d’énergies sobres en carbone, en prenant en compte les enjeux de lutte contre la pauvreté, d’équité sociale et d’accès à l’énergie.

12. Face aux besoins importants de financements additionnels pour la lutte contre le changement climatique, nous rappelons qu’il est essentiel de continuer à identifier des sources de financement diverses, notamment les financements innovants, comme la taxe sur les transactions financières mise en place par la France en 2012, dont une partie est allouée à la lutte contre le changement climatique dans les pays en développement. L’implication du secteur privé dans la lutte contre les changements climatiques est également cruciale.

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